Fin 2024, le marché de l’immobilier neuf en France donne lieu à des analyses contrastées, témoignant de la complexité et de la fragilité de la situation. Entre un regain d’intérêt des acquéreurs potentiels encouragé par une baisse des taux de crédit, l’inquiétante chute des mises en vente, la fin annoncée du dispositif Pinel et la nécessité de nouvelles mesures pour soutenir les primo-accédants, les professionnels de l’immobilier tentent de dresser un bilan nuancé de cette période charnière.
Selon les derniers indicateurs relayés en septembre 2024, certains signaux se veulent encourageants. D’après l’agence immobilière SGL, "la hausse de l’intention d’achat dans l’immobilier neuf s’est manifestée dès l’été, passant de 7% des Français se déclarant prêts à acheter un logement dans les 12 prochains mois en juin à 9% en juillet". Ce frémissement, quoique limité, est renforcé par l’amélioration des conditions de financement : la Banque centrale européenne (BCE) a en effet baissé son taux directeur à 3,5% et l’inflation est descendue sous la barre des 2% en août. Ces éléments favorisent la détente des taux de crédit, qui flirtent désormais avec les 3,5%, voire moins en cette fin d’année 2024. Un environnement que les courtiers considèrent comme propice à une reprise, ne serait-ce que partielle, du marché.
Toutefois, ce léger rebond de la demande cache des difficultés structurelles persistantes. Le marché du neuf reste sous tension. De nombreux observateurs dressent un tableau alarmant du deuxième trimestre 2024, marqué par une chute de 8,3% des ventes de logements neufs par rapport à l’année précédente. Plus préoccupant encore, les mises en vente ont plafonné à 13 953 unités, un plus bas depuis 2010. Un manque de renouvellement de l’offre qui ne fait qu’aggraver le déficit déjà criant de logements sur le territoire.
Ces difficultés sont alimentées par plusieurs facteurs : incertitudes économiques, disparition du dispositif Pinel le 31/12/2024, contraintes réglementaires et foncières, objectif de « zéro artificialisation nette » qui complexifie la disponibilité des terrains, et un contexte politique peu clair, laissant les professionnels du secteur sans feuille de route durable.
Les dynamiques locales montrent une disparité d’un territoire à l’autre. Selon l’Observatoire de l’Immobilier à Toulouse, les neuf premiers mois de 2024 confirment la persistance de la crise. Sur l’aire urbaine toulousaine, les mises en vente ont littéralement dégringolé, avec un recul de 52% par rapport aux trois premiers trimestres 2022. Malgré un léger mieux sur les ventes nettes (+10% par rapport à 2023), les volumes restent très en deçà des niveaux connus entre 2016 et 2019. Les investisseurs profitent des dernières opportunités du Pinel, mais une fois ce dispositif éteint, le risque est grand de voir l’offre se réduire encore plus, faute de projets suffisamment alimentés.
Dans les Alpes-Maritimes, l’Observatoire Immobilier d’Habitat constate en décembre 2024 une chute de 21% des transactions dans l’ancien sur un an et une hausse continue des prix, approchant désormais les 4 700 €/m². Le neuf, en forte tension, subit une baisse des permis de construire (-38%) et des mises en vente (-24%), tandis que les prix s’envolent à plus de 7 200 €/m². Cette pression confirme la difficulté d’accès au logement, notamment pour les plus jeunes, qui peinent à devenir propriétaires.
Face à ce constat, les professionnels et les fédérations du bâtiment multiplient les propositions. La Fédération française du bâtiment (FFB) plaide pour la création d’un « prêt à taux préférentiel » (PTP) pour les primo-accédants, imaginé sur le modèle du prêt à taux zéro. L’objectif : compenser la différence entre le taux du marché et un taux réduit (proche de 1,8% ou 1,9%) afin d’aider les acheteurs les plus fragiles à constituer leur apport et faciliter leur entrée dans la propriété neuve. Des différés de remboursement plus longs, de l’ordre de 10 ans, sont également évoqués pour donner un coup de pouce à ces ménages.
Le Blog Patrimoine évoque la possible mise en place d’une nouvelle loi de défiscalisation pour l’investissement dans l’immobilier neuf, jugeant cette initiative « inévitable » malgré son effet parfois inflationniste sur les prix. L’idée serait d’encourager la production neuve dans les zones tendues et de répondre à la crise du logement en proposant des dispositifs fiscaux alternatifs au Pinel, adapté à la nouvelle conjoncture.
En cette fin d’année 2024, l’immobilier neuf en France se retrouve à un tournant décisif. Si les conditions de crédit plus favorables et un regain d’intention d’achat laissent entrevoir une possible stabilisation, le manque criant d'offres, la fin de certains dispositifs fiscaux, la raréfaction du foncier et les contraintes réglementaires pèsent lourdement sur le secteur.